mardi 8 novembre 2016

Un tour au jardin



A Boulogne-Billancourt, aux portes de Paris, le banquier Albert Kahn créait dans sa propriété des jardins dits "de scènes". De la forêt vosgienne à la forêt bleue, en passant par l'inévitable jardin français et le jardin anglais, il faisait aussi aménager un jardin et un village japonais.
 Les personnalités du monde d'alors y défilaient, comme ici le poète indien Rabindranath Tagore.

Mis à part ces magnifiques jardins, Albert Kahn nous a laissé sa collection d'autochromes, témoignage de notre planète à l'aube du XXème siècle. Les "Archives de la planète", riches de plus de soixante-dix mille autochromes collectés entre 1909 et 1931, avaient pour but une plus grande connaissance des autres nations pour une meilleure entente entre les peuples.
Cette louable intention n'empêchera malheureusement pas la première guerre mondiale.


En 1990 le jardin japonais est "redessiné" par le paysagiste Fumiaki Takano. On y retrouve les grandes symboliques japonaises, yin et yang, orientation cardinale, torrents, fleuves et montagnes. Le tout sur moins d'un hectare.

Photos et suivantes de Hervé Colard (cliquez pour agrandir)

L'eau est le centre névralgique du jardin.


Pour s'y promener avant tout suivre les ondulations des carpes koï,

se repérer dans un univers de signes,

traverser mine de rien un village japonais,

puis se laisser guider par les seules teintes automnales des érables...

Le jardin japonais reproduit la nature en miniature ou plutôt en est une représentation. Pour, dans un espace restreint et clos, nous suggérer l'ampleur d'un paysage il joue sur le symbolisme, la perspective et la dissimulation :
          *Le jardin ne se révèle jamais complètement à la vue; pour cela le paysagiste multiplie les points de vue.
           *De plus il joue sur la taille réelle des éléments proches et lointains ainsi que des éléments extérieurs au jardin pour nous suggérer un espace immense. Comme dans la peinture chinoise l'étagement d'un premier plan, d'un plan intermédiaire et d'un plan lointain séparés par des vides (mousses, plan d'eau) nous entraîne dans des perspectives sans cesse renouvelées.
          *Quant à la symbolique un gros rocher ou un cône de pierres figurera un mont sacré du bouddhisme ou du taoïsme.
Il est évident aussi que chaque élément, arbre, rocher, chemin, cours d'eau,est avant tout une représentation de la nature et non la nature elle-même. Comme toute représentation, tout signe, il doit être redessiné sans cesse sous peine de se dissoudre dans le chaos. C'est là tout l'art des jardiniers qui sculptent et modèlent le jardin Albert Kahn.